• Baht'o ta Sokli et les ad'mazones chanteuses

    Baht'o ta Sokli



    Au Burkistan, la tradition qui a force de loi, dit que le souverain doit être alternativement un roi et une reine. Deux hommes ne peuvent se succéder à la tête du pays.

     

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    Il faut remonter loin dans l'histoire du pays pour retrouver la trace de cette coutume. Il faut remonter au règne du roi Bab Hhouillis II, règne qui fut marqué par une guerre avec le pays voisin, le Zakhzistan. Lors de la bataille d'Uhlala, l'armée Burkistanaise, inférieure en nombre et certainement mal entraînée, fut défaite et le roi Bab Hhouillis II fait prisonnier. L'armée Zakhzistanaise occupa la ville d'Uhlala et la fortifia. A partir de cette place forte, les envahisseurs lançaient à travers tout le Burkistan des raids meurtriers que l'armée royale, privée de chef, avait du mal à contenir. Les rivalités entre généraux, attisées par leur goût du pouvoir, ne permettaient pas de reprendre l'avantage.



    La situation s'enlisait lorsque l'épouse de Bab Hhouillis II, la reine Baht'o ta Sokli, prit l'initiative de convoquer l'état major au complet, au palais de Burkisul. Autant le roi s'avérait pusillanime, autant la reine manifestait des capacités réelles de femme d'état. Qu'une femme se mêla de politique était très mal vu à l'époque et une femme qui aurait tenté de déroger à cette coutume, aurait été raillée, voire rejetée ou emprisonnée.... mais je rappelle qu'il s'agit d'une époque très ancienne et on sait bien aujourd'hui, que les femmes sont tout aussi capables que les hommes qui reconnaissent tout-à-fait leurs capacités dans l'ensemble des pays modernes du globe et partagent volontiers la direction des affaires avec elles. La reine savait tout cela. Elle demanda aux membres de l'état-major d'entrer désarmés dans la salle du conseil, afin dit-elle: « de ne pas être tentés de se battre en cas de désaccord. »

     

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    Les officers, goguenards, acceptèrent et déposèrent sabres, dagues,.... avant d'entrer. La reine fit ensuite fermer les portes, devant lesquelles s'installèrent un grand nombre de charmantes servantes. Des rafraîchissements, des mets délicats étaient disposés sur de petites tables et on avait tendu des tentures brillantes aux murs. Elle fit asseoir les guerriers émoustillés par cet accueil et prit la parole pour leur annoncer qu'elle prenait en main la direction du pays. Aussitôt, les hommes bondirent sur leurs pieds, tentant de dégainer leurs armes... qu'ils n'avaient plus et chacun se mit à hurler des imprécations envers la souveraine. Celle-ci mit longtemps à ramener le silence. Lorsqu'elle put reprendre la parole, elle demanda, avec douceur, que ceux qui reconnaissaient son autorité se lèvent et viennent se placer à ses côtés. Quelques officiers, des jeunes pour la plupart, se levèrent alors et se dirigèrent vers elle, sous les regards furieux, les injures et même les menaces de mort des autres soldats. Baht'o ta Sokli attendit que le calme revienne à nouveau et déclara qu'elle comprenait tout-à-fait leur position, même si cela l'attristait au plus haut point. Elle ajouta qu'elle ne souhaitait qu'une chose, le retour de la paix après le départ de l'armée étrangère. Elle termina en disant qu'il ne lui restait plus qu'une formalité à accomplir pour que la sérénité reviennent parmi cette assemblée troublée. Elle fit un geste de la main vers les servantes qui se dirigèrent vers les tentures murales d'où elles sortirent arcs et flèches. Sans un mot, elles bandèrent leurs armes et avant que les officiers qui étaient restés au centre de la pièce aient eu le temps de réagir, elles les abattirent un à un. A la fin du massacre, Baht'o ta Sokli demanda à ceux des officiers qui étaient près d'elle de lui jurer fidélité, ce qu'ils firent sans hésiter. Elles leur confia la charge des différents régiments de l'armée mais également la formation d'un nouveau corps, celui des Amad'zones chanteuses, dont elle exigea qu'il devint le fer de lance du Burkistan.

     

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    Dans les semaines qui suivirent, l'armée fut réorganisée et entraînée. On recruta des femmes pour le nouveau corps des Amad'zones chanteuses sans soucis car nombreuses étaient celles qui souhaitaient montrer à leurs compagnons qu'elles pouvaient être leurs égales, voire plus. L'entraînement de cette troupe fut encore plus dur et exigeant que celui des hommes. Il se déroula dans l'île de Ghulbi où les femmes apprirent à survivre et à se battre dans des conditions extrèmes, mais également à chanter et danser. Il paraît que certaines abandonnèrent et que d'autres n'en revinrent pas.

    Et, un jour, à la demande de la reine qui dans le même temps avait réorganisé le gouvernement du pays, éliminant sans pitié ses opposants, les Amad'zones chanteuses défilèrent dans la capitale, à la tête de l'armée, avant de prendre la route d'Uhlala. Ce fut une grande et terrible bataille pendant laquelle les Amad'zones chanteuses se montrèrent si féroces que leurs collègues masculins eux-mêmes en furent impressionnés au point parfois d'oublier de se battre. Elles étaient partout, décochant flèche sur flèche, se battant au corps-à-corps, semant la désolation dans les rangs ennemis, tout en chantant. Les Zakhistanais finirent par battre en retraite dans la ville d'Uhlala, dont ils refermèrent les portes. L'armée Burkistanaise l'assiègea mais la ville était trop bien fortifiée pour pouvoir être prise de force. La situation risquait de durer.

     

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    La reine tint conseil et il fut décidé d'utiliser la ruse. L'armée bloqua tous les approvisionnement de la ville. Les chefs Zakhzistanais envoyèrent une délégation en demandant de laisser entrer dans la ville de l'eau et des vivres, ce que la reine refusa. En représailles, les Zakhzistanais jetèrent des Burkistanais par dessus les remparts, ce qui provoqua la colère des soldats Burkistanais qui lancèrent une attaque, mais toujours sans succès. La reine fit savoir qu'elle acceptait le ravitaillement de la ville. Une file de chariots s'ébranla un soir, transportant du grain et des barriques d'eau. Méfiants, prudents, les Zakhzistanais plongèrent leurs épées dans les sacs de grains et inspectèrent minutieusement les chariots avant de les laisser entrer. Au milieu de la nuit, une dizaine d'amad'zones chanteuses sortirent en silence de leur cachette aménagée dans les tonneaux à double fond et, telles des ombres mortelles, se dirigèrent vers les portes de la ville. Elles massacrèrent les gardes sans un bruit. Puis, elles ouvrirent les lourdes portes et laissèrent entrer leurs soeurs de combat qui mirent hors d'état de nuire l'ensemble des sentinelles. L'armée Burkistanaise put entrer dans la ville et libérer le roi.

    Ce dernier eut la sagesse de laisser sa femme, Baht'o ta Sokli gouverner et édicta la règle de l'alternance: dorénavant le souverain du pays serait alternativement, un homme et une femme.

     


  • Commentaires

    1
    Dimanche 4 Avril 2010 à 23:38
    Passionnante page d'histoire ! Merci
    2
    Mercredi 7 Avril 2010 à 21:48

    Je travaille d'arrache-pied pour avancer le plus possible avant le 1er mai.... mais ce pays est si riche et original..

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